vendredi 6 mai 2011

Le fils - Michel Rostain


Le onzième jour après ma mort, Papa est allé porter ma couette à la teinturerie. Monter la rue du Couédic, les bras chargés de ma literie, le nez dedans. Il se dit qu'il renifle mon odeur. En fait, ça pue, je ne les avais jamais fait laver ces draps ni cette couette. Ça ne le choque plus. Au contraire : subsiste encore quelque chose de moi dans les replis blancs qu il porte à la teinturerie comme on porterait le saint sacrement. Papa pleure le nez dans le coton. Il profite. Il sniffe encore un coup la couette, et il pousse enfin la porte du magasin.
Papa ne peut plus traîner. Condoléances, etc. Le teinturier re-condoléances, etc. débarrasse papa de la couette. Papa aurait voulu que ça dure, une file d'attente, une livraison, une tempête, juste que ça dure le temps de respirer encore un peu plus des bribes de mon odeur. Papa se dépouille, il perd, il perd.

Raconter un deuil, le deuil de son enfant n'est pas facile ; Michel Rostain ne raconte pas, c'est son fils décédé qui parle... Ce livre est original, jamais larmoyant parfois humoristique ; cependant j'ai été un peu déçu au regard des critiques lues. Mais cela reste un moment intense de lecture et surtout impressionnant : que décider de but en blanc pour les obsèques de ce fils décédé brutalement ; comment gérer l'inattendu, l'inacceptable. Devant cette fracture, on se révèle individuellement et collectivement... et parfois de façon surprenante.

3 commentaires:

  1. Dur, dur, l'idée du livre. D'autant plus quand on sait que l'auteur est 'passé par là'...
    Contrairement aux nombreux critiques de ce livre, je n'ai ni ri ni pleuré. Je n'ai pas pu m'approprier l'humour de ce fils disparu, qui a si bien bien fait de raconter sa propre histoire et celles de ses proches.
    Etrangement, la fin libère, on s'échappe au livre qui plombe pour se retourner vers autre chose.
    Comme dit Pat- c'est un moment intense de lecture...

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  2. Je suis d'accord avec toi sur le rire et les larmes : je n'ai pas eu non plus de grosses émotions mais des surprises ; je trouve que l'on en apprend beaucoup (entre autre) sur le détachement nécessaire lors d'une telle épreuve pour affronter les questions pratiques!

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  3. je n'ai pas réussi à entrer dans le livre, au risque de passer pour une sans coeur, rien...ni rire, ni larmes, je n'ai rien ressenti... même pas l'impression d'avoir lu un bon livre !

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